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La guerre et la paix

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IV

L'attaque fut ordonnée pour le 5 octobre.

La veille, Koutouzow signa la dislocation des troupes. Toll en fit lecture à Yermolow, en lui proposant de s'occuper des dispositions à prendre.

—On a envoyé deux de nos régiments sur la ligne même; ils y font bombance aujourd'hui.... Deux musiques de régiment et trois chœurs de chanteurs!...»

—Là-bas à Jechkine, dit un officier cosaque en lui indiquant au loin le toit d'une maison seigneuriale.

—Comment?... Mais c'est en dehors de la ligne des avant-postes!

«Pourvu qu'on ne me rende pas responsable de ce retard, se dit-il, voilà du guignon!»

«Personne à la maison,» lui répondit-on.

«Mais où est-ce donc?

«Le général est parti,» lui dit le domestique.

«Bien, bien, dit Yermolow, mais je n'en ai pas le temps dans ce moment.»

«Ah! ah! bravo, Nicolas Ivanovitch! Ah! ah! ah!»

Lorsque les différents exemplaires du plan furent prêts, on les remit à un officier, qui était ordonnance de Koutouzow, pour les porter à Yermolow. Ce jeune chevalier garde, tout fier de son importante mission, se rendit au logement occupé par Yermolow; il était vide.

Le plan de bataille combiné par Toll était excellent, aussi bien rédigé que celui d'Austerlitz, quoiqu'il n'y fût pas formulé en allemand: «la première colonne marche de ce côté, la seconde de tel autre»... etc.... Ces colonnes, indiquées sur le papier, devaient, à un instant donné, se réunir pour tomber sur l'ennemi et l'écraser. Tout y était admirablement prévu, comme c'est toujours le cas dans les dislocations écrites, mais, comme il arrive toujours aussi, aucune de ces colonnes ne se trouva à son poste en temps et lieu.

Le messager comprit qu'il avait doublement tort d'être entré dans un pareil moment, avec une mission importante; il voulut attendre, mais on le remarqua aussitôt, et l'un des généraux le désigna à Yermolow. Ce dernier, fronçant le sourcil, s'approcha de lui, écouta son rapport et prit son papier sans souffler mot.

L'officier franchit la ligne. En approchant de la maison, il entendit les chants joyeux du chœur des soldats, qui étaient couverts par les voix animées des assistants. Cette gaieté gagna le jeune officier, qui craignait néanmoins de s'être rendu coupable en tardant à remettre à son adresse l'ordre important dont il était chargé. Il était déjà neuf heures du soir; il descendit de cheval et gravit les marches du perron d'une grande et belle maison située entre les Russes et les Français et dont la conservation était parfaite: dans l'antichambre et dans l'office il aperçut des laquais occupés à porter des vins et des plats. Les chanteurs étaient placés à l'extérieur, devant les fenêtres. En entrant dans le premier salon, il y aperçut soudain tous les principaux généraux de l'armée, entre autres la grande et imposante figure de Yermolow. Tous, l'uniforme déboutonné, la figure enluminée, placés en demi-cercle, remplissaient la chambre de leurs rires bruyants, car, au milieu de la salle un d'eux, très bel homme, d'une taille moyenne, dansait avec légèreté le trépak.

L'envoyé se rendit chez un des généraux que Yermolow voyait souvent.

Il fit le tour du camp. Les uns disaient que Yermolow venait de passer avec quelques généraux, les autres qu'il était déjà revenu. Le malheureux officier continua ses recherches jusqu'à six heures; du soir, sans prendre même le temps de dîner, Yermolow resta introuvable, et personne ne savait où le prendre. Le messager s'étant quelque peu restauré chez un camarade, poussa jusqu'à l'avant-garde, chez Miloradovitch. On lui dit que celui-ci était sans doute au bal du général Kikine, et que Yermolow devait y être aussi.!

Il alla chez un autre. Même réponse.

«Tu crois que c'est sans intention qu'il est ici, dit au survenant un de ses camarades de l'état-major en parlant de Yermolow! Pas du tout, mon cher, c'est une farce qu'il joue à Konovnitzine. Tu verras demain quelle belle confusion il y aura!»

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