Le Tour du Monde en 80 Jours在线阅读

Le Tour du Monde en 80 Jours

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VII. QUI TÉMOIGNE UNE FOIS DE PLUS DE L'INUTILITÉ DES PASSEPORTS EN MATIÈRE DE POLICE

L'inspecteur redescendit sur le quai et se dirigea rapidement vers les bureaux du consul. Aussitôt, et sur sa demande pressante, il fut introduit près de ce fonctionnaire.

«Monsieur le consul, lui dit-il sans autre préambule, j'ai de fortes présomptions de croire que notre homme a pris passage à bord du Mongolia.»

—À Bombay.

—Vous venez de Londres?

—Soit, monsieur.»

—Possible, répondit Fix, mais ce n'est point ce dont il s'agit. Trouvez-vous, monsieur le consul, que ce flegmatique gentleman ressemble trait pour trait au voleur dont j'ai reçu le signalement?

—Oui.

—Oui. Un Français nommé Passepartout.

—Oui. Les passeports ne servent jamais qu'à gêner les honnêtes gens et à favoriser la fuite des coquins. Je vous affirme que celui-ci sera en règle, mais j'espère bien que vous ne le viserez pas…

—Oui, monsieur, répondit le gentleman.

—Monsieur le consul, répondit l'agent, si c'est un homme fort comme on doit le penser, il viendra!

—Je le sais, monsieur, répondit Phileas Fogg, mais je désire constater par votre visa mon passage à Suez.

—J'en conviens, mais vous le savez, tous les signalements…

—J'en aurai le coeur net, répondit Fix. Le domestique me paraît être moins indéchiffrable que le maître. De plus, c'est un Français, qui ne pourra se retenir de parler. À bientôt, monsieur le consul.»

—Faire viser son passeport?

—Et vous allez?

—Et pourquoi pas? Si ce passeport est régulier, répondit le consul, je n'ai pas le droit de refuser mon visa.

—Et cet homme est votre domestique?

—Eh bien, répondit le consul, il a l'air d'un parfait honnête homme!

—Cependant, monsieur le consul, il faut bien que je retienne ici cet homme jusqu'à ce que j'aie reçu de Londres un mandat d'arrestation.

—Bien, monsieur. Vous savez que cette formalité du visa est inutile, et que nous n'exigeons plus la présentation du passeport?

—Ah! cela, monsieur Fix, c'est votre affaire, répondit le consul, mais moi, je ne puis…»

«Vous êtes Phileas Fogg, esquire? demanda-t-il.

«Total des heures dépensées: 158 1/2, soit en jours: 6 jours 1/2.»

«Quitté Turin, vendredi, 7 heures 20 matin.

«Quitté Paris, jeudi, 8 heures 40 matin.

«Quitté Londres, mercredi 2 octobre, 8 heures 45 soir.

«Embarqué sur le Mongolia, samedi, 5 heures soir.

«Eh bien? demanda l'inspecteur.

«Bien, monsieur Fix, répondit le consul, je ne serais pas fâché de voir la figure de ce coquin. Mais peut-être ne se présentera-t-il pas à mon bureau, s'il est ce que vous supposez. Un voleur n'aime pas à laisser derrière lui des traces de son passage, et d'ailleurs la formalité des passeports n'est plus obligatoire.

«Arrivé à Suez, mercredi 9 octobre, 11 heures matin.

«Arrivé à Paris, jeudi 3 octobre, 7 heures 20 matin.

«Arrivé à Brindisi, samedi 5 octobre, 4 heures soir.

«Arrivé par le Mont-Cenis à Turin, vendredi 4 octobre, 6 heures 35 matin.

Quand le consul eut achevé sa lecture:

Mr. Fogg inscrivit ces dates sur un itinéraire disposé par colonnes, qui indiquait—depuis le 2 octobre jusqu'au 21 décembre—le mois, le quantième, le jour, les arrivées réglementaires et les arrivées effectives en chaque point principal, Paris, Brindisi, Suez, Bombay, Calcutta, Singapore, Hong-Kong, Yokohama, San Francisco, New York, Liverpool, Londres, et qui permettait de chiffrer le gain obtenu où la perte éprouvée à chaque endroit du parcours.

Le consul n'acheva pas sa phrase. En ce moment, on frappait à la porte de son cabinet, et le garçon de bureau introduisit deux étrangers, dont l'un était précisément ce domestique qui s'était entretenu avec le détective.

Il inscrivit donc, ce jour-là, mercredi 9 octobre, son arrivée à Suez, qui, concordant avec l'arrivée réglementaire, ne le constituait ni en gain ni en perte.

Et le consul, ayant signé et daté le passeport, y apposa son cachet. Mr. Fogg acquitta les droits de visa, et, après avoir froidement salué, il sortit, suivi de son domestique.

Et Fix raconta ce qui s'était passé entre ce domestique et lui à propos du passeport.

Cependant Mr. Fogg, en quittant la maison consulaire, s'était dirigé vers le quai. Là, il donna quelques ordres à son domestique; puis il s'embarqua dans un canot, revint à bord du Mongolia et rentra dans sa cabine. Il prit alors son carnet, qui portait les notes suivantes:

Celui-ci prit le passeport et le lut attentivement, tandis que Fix, dans un coin du cabinet, observait ou plutôt dévorait l'étranger des yeux.

Cela dit, l'agent sortit et se mit à la recherche de Passepartout.

Ce méthodique itinéraire tenait ainsi compte de tout, et Mr. Fogg savait toujours s'il était en avance ou en retard.

C'étaient, en effet, le maître et le serviteur. Le maître présenta son passeport, en priant laconiquement le consul de vouloir bien y apposer son visa.

Puis il se fit servir à déjeuner dans sa cabine. Quant à voir la ville, il n'y pensait même pas, étant de cette race d'Anglais qui font visiter par leur domestique les pays qu'ils traversent.

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